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En exclusivité, une interview de la merveilleuse Ariette DUGAS, qui participa activement aux séquences intercallaires des VISITEURS DU MERCREDI.
Nota Bene : je reproduis l'interview en exclusivité, toutefois je ne partage pas l'avis d'Ariette concernant le livre d'Agnès Moreau, qui malgré quelques oublis, est à mon avis, excellent !"

Les Visiteurs du mercredi » interview Fabrice Sigwalt. Paris 12-07-05

Bonjour Fabrice,

Merci encore pour l’intérêt que vous portez à cette lointaine aventure.
Pour ce qui est de ma formation et de mon parcours professionnel, je vous ai adressé un CV. C’est aussi simple.
Pour ce qui est d’aujourd’hui, j’écris toujours (j’ai reçu mes premiers droits d’auteur télévisuels en janvier 1971 pour les « contes du père Dodo, une « émission d’Armand Jammot) et je n’ai jamais cessé d’écrire. Et depuis mon divorce, en 1996, j’anime des ateliers d’écriture.

Voici mes réponses à vos questions.

Mon rôle dans Brok et Chnok :
Vaste programme ! Ayant fait des études aux Beaux Arts de Paris, j’étais familiarisée avec tout ce qui est graphique et manuel. Donc pas de problème pour couper la mousse (avec un couteau à viande), sculpter (avec des ciseaux de coiffeur), coller mousse, renforts, velcro (les bidons de colle gigantesques, fondaient comme neige au soleil), évider, poncer. Nous étions couvert de mousse et de colle en permanence, sur les mains, dans les cheveux, les oreilles, le nez.
Denis Dugas dessinait les personnages, puis faisait des petites maquettes en plâtre ou en pâte à modeler, ensuite il traçait les patrons, et se joignaient aux « petites mains », pour couper, sculpter, poncer, évider, coller, etc. Mais c’est lui qui s’occupait de la précision des regards, la mise au point des mécanismes intérieurs, des diverses textures, revêtements et peintures (parfois du floquage, parfois du tissu et un ami chimiste avait inventé un produit très spécial dont Brok et Chnok ont bénéficié) et enfin des ajustements et finitions personnages.
Il y a pas mal d’anecdotes et de scènes un peu surréalistes à raconter, par exemple, lorsque nous répétions, à sept heures du matin, dans le jardin pour avoir plus d’espace, les marionnettes géantes étant en mousse, il ne fallait pas les mouiller et je séchais les arbustes, herbes et buissons avec un sèche cheveux…
Pour ce qui est de l’animation, j’ai appris « sur le tas » au fil des spectacles.

L’équipe des Visiteurs :
Comme vous l’avez remarqué sur la photo que vous m’avez adressée, il y a quatre personnes : Denis Dugas, Jean Godement, Yves Brunier et moi–même. Il me semble indispensable de faire l’historique de cette équipe, car elle ne figure (à ma connaissance) sur aucun document.

Dans l’ouvrage de « Nounours à Casimir » édité par Massin, je peux vous dire que nous avons été un certain nombre ayant participé aux émissions de cette époque à avoir les yeux qui nous sortaient de la tête en le lisant. L’iconographie est très réussie, mais le contenu est inexact et farfelu. Je n’ai d’ailleurs à aucun moment été contactée bien qu’une note indique que l’enquête ait duré sept années. Si les photos sont jolies, les légendes sont également loufoques : un exemple la photo « Denis Dugas et Léonard» alors qu’il s’agissait de Boris Scheigam. (Et par ailleurs nulle part de photo de Denis Dugas). Fermons cette parenthèse.
Avant « les Visiteurs », il y a eu Casimir et le Pantosh’s théâtre.

Mais voilà comment tout a commencé :
Ma meilleure amie travaillait depuis plusieurs années avec Philippe Genty ainsi qu’Yves Brunier. Ce dernier avait été son partenaire durant les premières années de la Compagnie et s’apprêtait à partir.
Jean Godement avait été au Lycée technique de Sèvres en même temps que moi. Nous étions ami depuis.
Denis Dugas était illustrateur. Nous étions mariés.
Christophe Izard qui préparait son « île aux enfants » a demandé à Philippe Genty un personnage. Philippe Genty n’étant pas intéressé par cette proposition en a parlé à Yves Brunier. Monique Scheigam a parlé à Yves Brunier de Denis Dugas qu’elle connaissaient donc bien et dont elle appréciait le travail. De mon côté, j’ai pensé à Jean Godement qui faisait des petits boulots et cherchait un emploi intéressant.

Notre spécificité dans le « Pantosh théâtre » était des marionnettes de toutes tailles dont des géantes en mousse. Je me souviens particulièrement du « Petit Albert », mélange de comédiens, marionnettistes et objets animés. Dans ce spectacle, j’avais même fait les costumes dont un gigantesque ensemble de bébé tricoté en laine mèche rose avec chaussons et bonnet, le comédien étant Bouboule. (Je ne sais s’il joue encore, il était très proche de Coluche).
Nous avions un atelier pour la fabrication, le stockage des marionnettes et des décors et à l’étage de la maison, un espace destiné aux films d’animation avec un banc-titre et tout ce qui est nécessaire à l’animation.
Christophe Izard est venu voir tout ça.
Mais je ne me souviens pas du déroulement des négociations, je crois que je n’y assistais pas.
Et puis vint la commande De Brok et Chnok, des extra terrestres d’un vert très réjouissant, débarquaient sur notre planète bleue et faisaient partager aux enfants leurs étonnements, indignations et enchantements. Et bien entendu, il leur arrivait pas mal de déboires.
Les rôles étaient distribués ainsi, les « têtes » Denis Dugas, Yves Brunier. Les « bras » Jean Godement et moi. J’étais également le Shépiok.

Le Shépiok :
Je n’ai pas inventé le Shépiok, c’est Denis Dugas qui l’a créé. Mais j’ai inventé la voix type Cartoon du Shépiok et son langage « extra terrestre ».
C’était une sorte de chenille jaune, très mobile, animée avec des tiges. Ses interventions apportaient humour et piquant. Il intervenait comme intervient l’animal familier dans une série.

Quels étaient les rythmes de tournage ?:
Vie d’artiste et de mère de famille oblige, j’étais sur le pont, 7 jours sur 7 et 24h/24h.
Comme je secondais mon ex- mari, j’étais tout à la fois assistante, intendante, cuisinière, secrétaire, petite main, marionnettiste, écrivain, etc.
J’ai même le souvenir que parfois, lors des « charrettes » de nuit (fabrication, répétitions, films d’animation, etc…) je me couchais à même le sol et je dormais un quart d’heure. Avec le film « les petites voitures » je me reposais ainsi durant les réglages des éclairages.
Voilà pourquoi, pour moi, les rythmes de tournage se noient dans la masse.

Comment se déroulaient les tournages ? :
Les studios étaient encore dans le 7ème arrondissement et aux Buttes Chaumont. Dans mon souvenir cela se passait bien. Nous étions parfaitement ridicules tous les quatre dans nos collants bleus (tenues spéciale incruste) avec nos cagoules, cela amusait beaucoup les techniciens. Les tournages se déroulaient de manière différente selon les réalisateurs. Plus ils étaient créatifs, plus c’était chouette, meilleur était le résultat et plus nous étions contents.

Avez-vous écrit des sketches?
Oui. Ils étaient ensuite supervisés par Christophe Izard.

Quel est le nombre d’émissions enregistrées :
Je ne peux me prononcer sur le nombre, vous pourriez demander à la SACD. Je crois que la responsable du service s’appelle Colette Sopel. SACD tél : 01 40 23 44 44

Que pensiez-vous de Brok et Chnok ? :
J’adorais « Brok et Chnok » d’autant, que nous étions les premiers à sensibiliser le public jeunesse à l’écologie et au respect de la nature.

Vos souvenirs, anecdotes ? :
Je me souviens du direct qui était plus stressant, mais aussi de la personnalité merveilleuse de Jacques Trémolin, de Paul–Emile Victor. On offrait alors de la qualité aux enfants.
C’était aussi les débuts de Patrick Sabatier, d’Alain Bougrain Dubourg, de Dorothée.
Concernant les émissions enregistrées, c’était souvent le bazar entre la Déco et les Accessoires. Nous devions trouver des solutions de dernière minute pour pallier à tout ça. Il y avait « le cube » aussi qui était, semble-il, un casse-tête. Étant plus petite que mon ex-mari et devant être à sa hauteur pour faire « le bras », j’avais besoin d’un cube pour grimper dessus. Je me souviens de « la course au cube » qui manquait régulièrement. Comme à cette époque, à la télé, les tâches étaient très cloisonnées, il fallait que ce soit le spécialiste « es-cube » qui l’apporte, fallait-il encore mettre la main dessus…. Et puis les lumières. C’était variable d’une émission à l’autre. Parfois c’était super, parfois la catastrophe. Or comme nous tournions en trucage, il fallait que ce soit réglé aux petits oignons. Ce qui ne variait pas : les lumières s’éteignaient à l’heure pétante même si nous étions au milieu d’un sketch au désespoir des réalisateurs. Et de nous aussi d’ailleurs.

Pile et Glou, pourriez-vous me parler d’eux ? :
Pile et Glou étaient deux personnages également extra-terrestres. Ils vivaient dans une sorte de caverne et leur environnement était très joli. (Créé par Denis Dugas dans l’esprit de ses dessins de l’époque).
Ils étaient oranges, poétiques, terriblement sympathiques.
Pile était vive, joyeuse. C’était une scientifique et Glou un bon gars genre « brute des cavernes ». Son cri de « Tarzan » était : « Agougougououououou… !» .
Ensemble, ils découvraient les turpitudes terrestres sur une petite télé. C’était du direct. Mon ex-mari a créé les personnages et nous écrivions et animions à tous les deux.
Par hasard, je suis tombée sur la seule photo qui me reste de cette époque et il s’agit justement de Pile et Glou. (Je vous l’envoie en même temps que ce texte).

Pourriez-vous me parler de Brutus, avez-vous une photo de lui ? :
J’adorai Brutus, dont je faisais et l’animation et la voix. C’était une sorte de diplodocus vert très farceur. En mousse floquée, il était souple, vraiment agréable à manipuler. Mon ex-mari ayant notre Book, il pourra vous communiquer photos et dessins, je pense.

Pourquoi Pile et Glou se sont arrêtés si rapidement ?
Aucune idée ! Mais je l’ai regretté. Heureusement il y en a eu d’autres, par exemple Gribouille créé par Denis Dugas. Nous avons écrit les textes de concert. C’est Sylvie Deniau qui a fait la voix off au début des émissions et suite, à son triste décès, Cécile Grandin.

Voilà, Si vous avez d’autres questions n’hésitez pas à me les poser.


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